Photographe adepte du noir et blanc, du format carré comme du rectangulaire, Alain Janssens pose une réflexion sur le temps, à travers deux expositions simultanées et un bel ouvrage à l’italienne (« Temps brassé », 85 illus, €23). Un parcours sélectif sur dix années de prises de vues, qui s’organise en fonction des climats, des ambiances, des noirs très sombres, plutôt qu’en fonction de thématiques, certes présentes, mais sans insistance. Le photographe affectionne les natures mortes, un citron, des poires, les objets du quotidien, des fragments de visages, mais on perçoit chez lui cette capacité à les conjuguer au présent. Qu’il s’agisse d’instantanés, d’images légèrement floues, ou de clichés longuement mûris, les images fuient le cadrage spectaculaire et recomposent un paysage mental sans mièvrerie, fait de rêveries, de rencontres, de hasards aussi. Mais pas d’uniformisation dans tout cela : les humeurs, les chocs de la vie, la méditation visuelle, l’intimité, coexistent, dialoguent ou s’évitent, selon les heures. On devine le photographe en quête de ce que la rapidité et les réalités quotidiennes nous empêchent parfois de voir encore. Un geste, un insecte, le reflet des arbres à la surface d’un étang, des fleurs qui fanent dans un vase : les choses simples de la vie.
Alain Delaunois
Trends Tendances. 16 juin 2005